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27 août 2010 5 27 /08 /août /2010 17:15

Références pour maîtriser le concept géographique "habiter"

 

NB la notion peut être considérée comme inutilement polluée par un verbiage philosophique exagérément contourné (c'est en tout cas l'avis de l'auteur de ces lignes). Il n'est donc pas inutile d'oublier une référence ancienne à l'oeuvre de Maurice le Lannou, aujourd'hui bien oublié qui a proposé dès 1949 le concept d'homme-habitant dans sa Géographie humaine.

Voici ce que ses élèves écrivaient dans leur nécrologie ( Bethemont Jacques, Commerçon Nicole. Introduction à la lecture de Maurice Le Lannou / Introduction to the works of Maurice Le Lannou. In: Revue de géographie de Lyon. Vol. 68 n°4, 1993. La géographie de Maurice Le Lannou. pp. 209-211. url : http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geoca_0035-113x_1993_num_68_4_5858 :)

 

... A terme et à travers la diversité des points de vue, l'idée s'impose d'une nécessaire réévaluation de son apport à la discipline. De fait, La Géographie humaine, parue en 1949 et qui peut être considérée comme la pierre angulaire de son œuvre, a été le plus souvent lue comme une sorte de chant du cygne sur lequel s'achèverait la géographie classique. De même, le concept d'homme-habitant s'est vu attribuer une connotation passéiste, le dit habitant étant relégué, selon l'échelle choisie, dans d'obscures paroisses ou de lointaines provinces : les nouvelles géographies, appliquée, marxiste ou quantitative, allaient changer tout cela. Il est pourtant facile d'établir qu'à travers cette notion d'homme-habitant, c'était la relation existant entre l'homme et l'espace délimitant son enracinement culturel qui était en cause, relation privilégiée qui n'excluait pas d'autres échelles spatiales correspondant à l'ensemble des activités intéressant des individus ou des groupes qui n'étaient pas forcément voués à l'unanimisme culturel. Reste que la dilution scalaire caractéristique de notre époque était analysée par Maurice Le Lannou comme un facteur plus négatif qu'enrichissant. Cette thèse, largement développée dans Le déménagement du territoire, était évidemment difficile à soutenir alors que la mode était au "village planétaire". Elle a en tout cas conforté l'image passéiste de son promoteur.

Ajoutons enfin que pour Le Lannou, la géographie était une, englobant dans une finalité d'analyse régionale, les divers items de la discipline, depuis les composantes du milieu jusqu'à ce qui n'était pas encore la géographie sociale. "Je classerai la géographie", disait-il, "au nombre des sciences morales et politiques, ce qui est dire que, sans contester le bien-fondé de son partage, aux fins de la recherche, en rubriques analytiques mineures, je tiens sa seule justification dans un effort auquel les mots de rassemblement et même de synthèse conviennent imparfaitement. "Compréhension" - en donnant au terme sa valeur étymologique - dirait mieux." Or, l'époque était à la spécialisation, chaque discipline s'agrippant à une branche ou un rameau de l'arbre des sciences comtien : l'agrégation d'histoire-géographie venait à peine d'être scindée en deux concours distincts, que la géographie physique revendiquait son autonomie en se rapprochant des sciences de la terre. Du coup, la position unitaire de la discipline était jugée obsolète, tout comme elle serait plus tard suspecte aux yeux des tenants d'une géographie relevant exclusivement des sciences de l'homme.

Est-ce pour cela qu'une fois remise en cause la vague quantitativiste et matérialiste, un nouveau courant de la pensée géographique, bien qu'axé sur les notions de perception et de paysage, n'a pas fait plus qu'il ne convenait, référence à l'homme-habitant et à son échelle spatiale ? Comment expliquer que de bons auteurs comme Armand Frémont ou Augustin Berque notamment, n'aient pas renoué avec le fil distendu de la géographie humaniste ? L'espace vécu d'Armand Frémont est bien celui de l'homme-habitant et la notion de trajection ou relation entre le paysage- empreinte et le paysage-matrice que propose Augustin Berque, renvoie à la relation définie par Maurice le Lannou entre les groupes humains et les paysages que l'action humaine transforme et produit, cependant qu'il modifie leurs comportements. Seul, Paul Claval soulignera brièvement2 la dimension philosophique d'une oeuvre qui transpose en termes d'espace et de destinée humaine, le thème fondamental de la philosophie existentielle. Pour le reste, il s'inscrivait dans la droite ligne de la géographie française, celle de Vidal de la Blache et de Demangeon.

Il se pourrait donc bien, qu'au tournant des années cinquante, la géographie française n'ait pas saisi l'opportunité d'un débat qui aurait pu être fondamental. Mais la faute n'en incombe-t- elle pas au premier intéressé ? La publication de La Géographie humaine avait suscité de la part de Pierre George3 plus encore qu'une critique, un questionnement : à l'image de l'homme-habitant suspecté à la fois d'immobilisme spatial et d'une certaine passivité face au monde extérieur, ne fallait-il pas substituer l'image dynamique de l'homme producteur et consommateur, ouvert sur le monde et tourné vers l'avenir ? Maurice Le Lannou ne voulut jamais entrer dans un débat que le contexte politique de l'époque tendait à réduire en termes de progrès et de réaction et, pour tout dire, en termes de lutte des classes. Non qu'il craignit la controverse. Plus simplement, il estimait qu'ayant délivré son message, il pouvait l'enrichir, mais n'avait rien à en retrancher, moins encore à en débattre."

 

2 - P. Claval (1984), Géographie humaine et économique contemporaine, Paris, PUF, p. 91.3-P. George (1950), Réflexion sur la géographie humaine, à propos du livre de M. Le Lannou, Annales de Géographie, T.59, pp. 214-218.

 

L'enjeu aujourd'hui est l'introduction de la phénoménologie dans la réflexion géographique. A ce propos, l'une des matrices intellectuelles est le livre d'Augustin Berque Ecoumène, (Belin) paru en 1987 et réédité, toujours chez Belin en poche en 2009.

Autre référence, chroniquée dans un article des cafés géo : Habiter, le propre de l’humain. Villes, territoires et philosophie (Thierry Paquot, Michel Lussault et Chris Younès) La Découverte, 2007.

 

 

André-Frédéric Hoyaux a publié plusieurs articles sur ce thème :

 

- dans la revue Espace Géographique :


"Pragmatique phénoménologique des constructions territoriales et idéologiques dans les discours d’habitants"


- Sur le site Cybergeo : European Journal of Geography, Epistémologie, Histoire de la Géographie, Didactique

"Entre construction territoriale  et constitution ontologique de l’habitant : Introduction épistémologique aux apports de la phénoménologie au concept d’habiter"

 

Les constructions des mondes de l’habitant : Eclairage pragmatique et herméneutique


Dans la même veine, on peut se référer à un article de Rodolphe Dodier

- "Habiter : ce que le périurbain nous apprend"

 

Mathis Stock a publié deux articles dans la revue EspacesTemps

- "L’habiter comme pratique des lieux géographiques".

 

- "L’hypothèse de l’habiter poly-topique : pratiquer les lieux géographiques dans les sociétés à individus mobiles".

 

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12 septembre 2009 6 12 /09 /septembre /2009 16:50

Quatre essais d’épistémologie et quatre approches de la géographie, parfois divergentes, souvent complémentaires : fiche de lecture, par Olivier Trannoy.

 

1)      Eléments d’épistémologie de la géographie d’Antoine Bailly et Robert Ferras, Colin, 2ème édition, 2004.

 

La géographie n’est pas la science de l’espace, mais celle des représentations de l’espace et des pratiques qui en résultent.  Par conséquent, la géographie est :

- conceptuelle : les concepts majeurs sont liés soit à l’environnement (écosystème, paysage, milieu, équilibre), soit à la position géographique (distance, polarisation, espace local, région, nation, échelle, territoire,  espace social, système), soit au développement (ressources, urbanisation, inégalité spatiale), soit dépendants des représentations spatiales (espace vécu).

- structuraliste : la structure est la manière dont les parties sont arrangées entre elles. La recherche des structures renvoie aux invariants, aux fondamentaux qui ont une signification pour la connaissance des systèmes spatiaux.

- systémiste : le système est un ensemble d’éléments interdépendants et traités comme un tout. La géographie étudie ces différents éléments et les interactions entre eux (exemple du « système-monde » d’Olivier Dollfus).

- modélisatrice : modéliser, c’est identifier les éléments essentiels d’un espace géographique et les relations les plus fortes entre eux. Le modèle est jugé représentatif d’une série d’éléments de même nature, région, montagne, ville, littoral, etc. Cette abstraction donne lieu à une représentation concrète à travers des symboles reconnus : les chorèmes (voir Roger Brunet). La carte décrit tandis que le modèle explique selon une démarche hypothético-déductive : « le modèle graphique propose une représentation d’une réalité géographique, en vue d’une démonstration par la mise à plat et le décryptage de ses dynamiques spatiales. » (Robert Ferras)

 

La géographie générale qui se déclinait par stratification des connaissances présentées en deux temps distincts (géographie physique et géographie humaine) s’appuie désormais sur l’étude de deux grands thèmes : 1) les hommes et leur répartition ; 2) Les sociétés face aux contraintes des différents milieux aménageant leur espace pour en utiliser les ressources. La géographie générale s’efforce de saisir ce qu’il y a de permanent ou de régulier dans les faits terrestres (organisation ou structures), de rapprocher ces faits, de les éclairer les uns par les autres de manière à en expliquer les conditions, et les évolutions de ces faits (les dynamiques). Les combinaisons locales des faits étudiés par la géographie générale relèvent de la géographie régionale. 

 

2)      Le déchiffrement du monde. Théorie et pratique de la géographie de Roger Brunet, Belin, 1999.

                                              

Selon Roger Brunet, la démarche géographique doit être :

- sociale : elle étudie la production de l’espace par les sociétés. La société produit de l’espace matériel, visible, tangible dans ses implantations, ses équipements, ses infrastructures, ses paysages. L’espace organisé est une dimension intrinsèque des sociétés. C’est la relation sociale qui fait l’espace : migrations, choix de résidence, lieux de vacances sont guidés, orientés par des équipements, des gradients, des coûts et des distances, par des images et des discours qui les représentent.

- analytique : elle étudie des structures spatiales. L’espace géographique est organisé, il a ses lois, ses structures et ses règles de transformation. Les lois fondamentales de l’espace tiennent à la distance et à l’espacement : distance par rapport aux centres et lieux d’action, espacement des personnes et des activités. Partition et appropriation des fragments de l’espace sont en fonction de l’organisation sociale et des représentations que les sociétés se font de leurs besoins, de leurs moyens, des qualités qu’elles perçoivent des lieux.

- systémique : elle étudie les interactions, les flux, les champs  (un champ est un espace où se manifeste un phénomène géographique ; il se caractérise par des circulations et des gradients, des centres d’action, des lignes de force et de propagation, des creux, voire des vides internes que ses courants contournent ; il a des limites parfois nettes, le plus souvent en franges indécises).

- multiscalaire : elle étudie l’organisation et les dynamiques internes d’un espace, mais aussi les relations que cet espace entretient avec les espaces voisins ou englobants, autrement dit les champs dans lesquels se trouve cet espace.

 

Pour Roger Brunet, l’espace géographique est fondamentalement discontinu, orienté et radicalement dissymétrique. Les sociétés agissent sur l’espace géographique de cinq façons : 1) elles s’y abritent (elles y habitent) ; 2) elles se l’approprient (donc le partagent) ; 3) elles l’exploitent (donc le mettent en valeur et en ont un usage spécifique qui spécialise les lieux) ; 4) elles y échangent (donc elles y circulent car la spécialisation des lieux implique aussitôt l’échange entre les lieux et induit des flux) ; 5) elles l’organisent.

 

Pour Roger Brunet, tout espace singulier est fait de l’arrangement plus ou moins complexe d’une petite quantité de structures élémentaires. Il a ainsi mis au point une syntaxe de l’espace géographique dont les chorèmes sont les structures élémentaires, ou encore l’alphabet de l’espace. Les chorèmes sont des combinaisons simples entre trois figures de base de la géométrie : le point, la ligne, la surface.
28 chorèmes résultent du croisement de ces figures élémentaires. Cliquez sur ce lien pour visualiser le tableau des chorèmes : http://www.hypergeo.eu/IMG/jpg/choremesgen.jpg

Les chorotypes sont des formes spatiales types, soit une combinaison des chorèmes (ou structures élémentaires de l’espace). Les chorotypes (ou modèles géographiques) peuvent s’observer à différentes échelles. On peut citer plusieurs exemples de modèles : l’île tropicale, le piémont, l’estuaire, la ville islamique, la façade maritime, la station touristique, l’openfield, le bocage, le bidonville, le CBD, la huerta, la ZIP, le complexe aéroportuaire, l’oasis, l’atoll ; la double agglomération frontalière, la mégalopole, etc. Le géographe Michel Lussault parlait plus récemment d’espaces génériques (dans L’Homme spatial, Le Seuil, 2007, dont je vous recommande vivement la lecture…) pour évoquer des espaces dont l’organisation et les paysages étaient observables à l’identique dans le monde entier.

 

Cette démarche est développée dans Les mots de la géographie, dictionnaire dirigé par Roger Brunet, Robert Ferras et Hervé Théry, paru aux éditions RECLUS en 1993. Elle a été mise en œuvre dans les différents volumes de la Géographie universelle, publiés aux éditions Belin depuis 1990.

                                     

3)      Europe, une géographie de Jacques Lévy, Hachette, 1997.

 

Dans la conclusion de son ouvrage, Jacques Lévy tente d’expliquer la démarche mise en œuvre pour aborder la géographie de l’Europe. Si son propos est souvent complexe, quelques principes peuvent être retenus.

L’auteur propose de recourir à des causalités non linéaires et aux outils du systémisme. Il s’agit de prendre conscience du rôle décisif des acteurs spatiaux et de leur intentionnalité, mais aussi de prendre en compte le fait que les représentations spatiales de ces acteurs sont aussi des actes qui modifient l’organisation d’un espace. Pour Jacques Lévy, le concept clé de la géographie est la distance, qu’il décline en quatre valeurs : l’enclavement, la coprésence, l’écart et l’ubiquité. Pour mesurer une distance, il convient d’utiliser des métriques, rassemblées en deux familles : 1) des métriques topographiques pour les distances continues et exhaustives (permettant d’étudier les territoires et leurs confins) ; 2) des métriques topologiques pour les distances discontinues et lacunaires (permettant d’étudier les réseaux ou les frontières). Dans L’Homme spatial (cité plus haut), Michel Lussault met en lumière de façon très intéressante (et, me semble-t-il, plus claire que Jacques Lévy) le fait que la mondialisation privilégie les proximités topologiques par rapport aux proximités topographiques, dessinant ainsi un monde de métropoles fonctionnant en réseau, ou en archipel.

 

Cette démarche est développée dans le Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, dirigé par Jacques Lévy et Michel Lussault et paru en 2003 aux éditions Belin.

 

4)      De la géopolitique aux paysages. Dictionnaire de la géographie d’Yves Lacoste, Colin, 2003.

 

Yves Lacoste adopte une méthode d’analyse de l’espace s’appuyant sur l’emboitement des échelles, avec huit ordres de grandeur, de l’unité de dizaines de milliers de km (1er ordre) à celle en mètres (8ème ordre), sachant qu’on passe d’un ordre à l’autre en divisant la dimension par 10. Cette méthode, moquée par Jacques Lévy pour son simplisme, a néanmoins l’intérêt d’insister sur l’approche multiscalaire de la géographie.

Cette méthode d’analyse, une solide formation en géomorphologie, un intérêt pour le paysage et une réflexion constante en géopolitique constituent les fondements de la géographie selon Yves Lacoste. L’auteur défend l’idée d’une étude classique des rapports hommes-nature, doublée d’une approche des rivalités de pouvoir sur un territoire (géopolitique).

 

Pour finir, voici quelques sites à consulter pour vos cours de géographie :

http://geoconfluences.ens-lsh.fr/accueil/index.htm

http://www.cybergeo.eu

http://mappemonde.mgm.fr/index.html

 

 

 

 

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8 septembre 2009 2 08 /09 /septembre /2009 20:32

Extraits d’Habiter. La condition géographique, d’Olivier LAZZAROTTI, Belin, coll° Mappemonde, 2006

(Remarque : les passages mis en italique le sont par l’auteur tandis que ceux mis en gras l’ont été par son lecteur…)

 

Problématiques géographiques :

 

- « Au fait, qu’est-ce donc « ce » qui change, quand un homme change de lieu et qui, parfois aussi, le change ? Qu’est-ce que « ça » change d’être ici ou là ? Et pourquoi aller ici, et non pas là ? Et qu’est-ce à dire ce choix d’un ici, face à tant d’autres là-bas ? Mais alors, et du coup, qu’est-ce qui ne change pas d’un homme, quand il change de lieu ? Mais aussi, qu’est-ce qui ne change pas quand on ne change pas de lieu ? Et qu’est-ce qu’un homme peut changer en changeant de lieu ? Peut-il changer sans changer de lieu ? Désormais ce « quoi » et ce « qui » sont au cœur de la science géographique. » (p 6) « Où être à sa place ? » (p 98) « Qu’est-ce qui change quand on change de lieu ? » (p 111)

- « La consubstantialité de l’espace habité et de l’habitant constitue désormais le socle théorique de cette pensée géographique dans la quelle nous nous reconnaissons : ne pas traiter du monde et, secondairement, des hommes mais traiter des hommes à travers les informations du monde. Il s’agit donc bien, à la fois, de séparer « espace habité » et « habitant », mais aussi d’en proposer un agencement synthétique. Autrement dit, il faut doter la géographie d’une passerelle pertinente qui permette de penser cette relation spécifique de l’espace habité à l’habitant afin d’en tirer l’immense richesse qui est celle de tous les phénomènes humains : comment peut-on avoir accès à l’homme, singulièrement et collectivement, par le monde ? » (p 170)

 

Tentative de définitions : « habiter » et « espace habité » :

 

- En partant de l’exemple du détroit du Pas de Calais : « Aujourd’hui comme hier donc, mais selon ses propres pratiques et dans le droit fil de logiques politique, économique, sociale et culturelle, l’homme y habite jusqu’à ce point paradoxal d’y laisser profondément une trace, spécifique et reconnaissable, malgré l’eau : lignes, nœuds, frontières, règles, etc. […] Il faut donc comprendre l’espace habité comme l’espace informé par l’homme.  […] L’espace habité est ainsi l’espace informé par et pour l’homme, soit par et pour les relations humaines.» (p 29)

 

- L’auteur propose une approche géographique fondée sur « l’emboîtement de l’espace habité et des habitants en déplacement, quand le territoire est l’espace parcouru.» (p 113) Il s’agit d’étudier « l’alliance singulière d’emplacement(s) et de déplacement(s) » réalisée par chaque habitant. (p 139)

 

- L’auteur considère que le fonctionnement de l’espace habité est de nature topologique.

 

L’auteur propose aussi de redéfinir quelques notions :

 

- La PLACE : « La place constitue l’une des réponses que chaque habitant apporte à la question « où être ? ». Comme là où il est, elle réfléchit aussi d’où il vient et peut-être où il va. Elle est ainsi cartographiable et, dans cette perspective dynamique, contient et réunit l’ensemble des lieux fréquentés par un homme au cours de sa vie. » (p 99)

 
- Le TERRITOIRE : « L’approche défendue ici est de considérer comme territoire un ensemble de LIEUX à travers lesquels il est possible de circuler. Et c’est ainsi que le territoire peut être défini comme la mesure du mouvement. Implicitement, elle inclut celle de l’immobilité. Elle insiste ainsi sur la possibilité, réalité d’un homme ou virtualité d’une collectivité, du déplacement, soit du changement de lieu. » (p 53) « La connaissance de ce territoire est la condition qui rend sa traversée possible en même temps qu’elle en marque les limites. » (p 113) Pour caractériser les limites de ce territoire connu, l’auteur propose d’utiliser la notion d’HORIZON qui « réfléchit la différence, si ce n’est la tension, entre ce que les habitants savent du monde et ce qu’ils en ignorent.» (p 113) L’HORIZON est une « ligne qui ferme [et] donc aussi une ligne qui ouvre ou, plus exactement, l’invitation permanente et ininterrompue faite à l’homme de dépasser ces limites qui sont aussi les siennes, celles de ses territoires pour se situer, résolument, dans une perspective mondiale. » (p 114)

 

- L’URBANITE et la RURALITE : « Les déplacements sont donc créateurs d’échanges et de commerce, au sens le plus large de ce terme qui induit sa portée symbolique. Réciproquement, la fréquentation de plusieurs lieux, quelles que soient, du reste, les modalités des différents emplacements tenus, participe à la mise en œuvre d’un style de vie que l’URBANITE pourrait bien qualifier au mieux. […] Ce n’est donc pas l’emplacement ou le déplacement qui signifie l’habitant, mais le rapport qu’il établit entre les deux et qui constitue sa place dans le monde. Le style de vie qui y est associé n’est pas seulement rapport au monde, mais, en tant que tel aussi, rapport aux autres. Si la RURALITE trouve son fondement dans cette sorte de communautarisme que définit le partage d’un seul et même lieu, l’URBANITE, comme composante territoriale, trouve ses ressorts très précisément dans l’ordre de la société, par l’apprentissage et la prise en compte des diversités. » (p 151-152) L’auteur évoque ainsi les « CAMPAGNES URBAINES, considérées comme telles parce que non seulement peuplées d’urbains, mais aussi, de plus en plus, ordonnées selon des logiques urbaines. » (p 156)

 

Deux remarques intéressantes sur la mondialisation :

 

- « Une partie des habitants de l’humanité accède à la mondialité et à ses styles de vie. Le monde est leur maison, non parce qu’il est devenu uniforme, mais parce qu’ils ont acquis les moyens de s’y déplacer. […] il semble [néanmoins] tout à fait exagéré de considérer qu’il existe des habitants exclusivement mondiaux, au sens où ils auraient abandonné toute trace d’une autre composante, locale ou territoriale. » (p 155)

 

- L’auteur insiste sur le fait que « toute mondialisation […] n’est pas seulement uniformisation, mais uniformisation et diversification. Sa singularité est ainsi dans cette balance entre les deux, entre les points communs du monde et ses différents lieux, ses ruptures et ses continuités, etc. » (p 88)

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